Les investissements e-commerce des retailers européens : comment maximiser la rentabilité dans un paysage en mutation
L’impératif de la rentabilité à l’ère du digital
La digitalisation accélérée du retail en Europe, catalysée par la pandémie et l’évolution des attentes consommateurs, a profondément transformé le secteur. Si la croissance du chiffre d’affaires e-commerce reste soutenue, la rentabilité de ce canal demeure un défi majeur pour de nombreux acteurs. Selon une récente étude menée auprès de décideurs du retail en Europe, 85 % estiment que la pandémie a changé durablement la nature du commerce, et 96 % anticipent une poursuite de la croissance du e-commerce. Pourtant, seuls 73 % s’attendent à une amélioration de la rentabilité e-commerce dans l’année à venir, et un quart des retailers déclarent que leur activité e-commerce n’est pas encore profitable.
Les défis structurels du e-commerce européen
Les retailers européens font face à une double pression : répondre à des consommateurs toujours plus exigeants en matière d’expérience digitale, tout en absorbant l’augmentation des coûts logistiques, des retours et de la gestion omnicanale. Les marges sont érodées par la hausse des coûts de livraison, la multiplication des options de fulfillment (BOPIS, livraison express, click & collect), et la gestion des retours, qui peut représenter jusqu’à 40 % des commandes dans certains segments comme la mode. Par ailleurs, la fragmentation des systèmes IT hérités, la complexité des organisations et la difficulté à aligner les priorités internes freinent la capacité à investir efficacement dans la transformation digitale.
Où investir pour booster la rentabilité ?
Les décideurs européens identifient cinq leviers prioritaires pour améliorer la rentabilité e-commerce :
- L’expérience client digitale : 53 % des retailers placent l’amélioration de l’expérience client digitale (parcours omnicanal, personnalisation, mobile, social selling) en tête des investissements à réaliser. L’objectif est de fluidifier le parcours, d’augmenter le taux de conversion et la fidélisation, tout en réduisant les coûts d’acquisition client.
- L’omnicanalité : 50 % considèrent l’intégration omnicanale comme un levier clé. Cela implique la refonte des plateformes e-commerce (replatforming, headless commerce), l’expansion via les marketplaces, et la gestion dynamique des prix et promotions. L’omnicanalité permet d’optimiser l’utilisation des stocks, de réduire les ruptures et d’offrir une expérience cohérente sur tous les canaux.
- La modernisation de la supply chain : 43 % des retailers investissent dans l’optimisation logistique (multiplication des options de livraison, micro-fulfillment centers, automatisation, visibilité temps réel des stocks). L’objectif est de réduire les coûts de livraison, d’accélérer les délais et de mieux gérer les pics de retours.
- La data et la monétisation : 38 % misent sur la modernisation de la stack MarTech, l’exploitation de la data client (CDP, analytics, retail media) et la personnalisation avancée. La data permet d’optimiser les campagnes marketing, d’augmenter la valeur vie client et de générer de nouveaux revenus via la monétisation des audiences.
- Le service client digitalisé : 33 % investissent dans l’automatisation du support (selfcare, chatbots, clienteling), pour réduire les coûts tout en améliorant la satisfaction client.
Les freins à l’exécution : du diagnostic à l’action
Si 90 % des décideurs européens affirment savoir quelles actions sont nécessaires pour améliorer la rentabilité e-commerce, près de la moitié peinent à investir ou à exécuter ces priorités. Les principaux obstacles identifiés sont :
- Le manque d’alignement organisationnel et de gouvernance,
- La complexité des systèmes IT et la dette technique,
- La difficulté à prioriser les investissements dans un contexte de pression sur les marges,
- La pénurie de talents digitaux et data.
Les spécificités européennes : réglementation, omnicanalité et attentes consommateurs
Le contexte européen se distingue par une forte hétérogénéité des marchés, une réglementation stricte (RGPD, DSA, DMA), et des attentes élevées en matière de protection des données et de durabilité. Les retailers doivent composer avec des modèles omnicanaux complexes, des réseaux de magasins denses, et une concurrence accrue des pure players internationaux. L’intégration des canaux physiques et digitaux, la personnalisation dans le respect de la vie privée, et l’optimisation de la logistique urbaine sont des enjeux particulièrement prégnants.
Recommandations pour les retailers européens
- Adopter une approche holistique de la transformation digitale, en alignant stratégie, expérience client, supply chain, data et organisation.
- Investir dans la modernisation des plateformes e-commerce et de la supply chain, pour gagner en agilité et en efficacité opérationnelle.
- Exploiter la data pour personnaliser l’expérience et monétiser les audiences, tout en respectant les exigences réglementaires européennes.
- Favoriser l’innovation organisationnelle : casser les silos, renforcer la collaboration entre IT, marketing, logistique et magasins.
- Mesurer la rentabilité des investissements digitaux via des KPIs clairs (marge par commande, coût d’acquisition, taux de retour, valeur vie client).
Conclusion
La rentabilité du e-commerce en Europe ne se résume pas à une question de volume, mais d’excellence opérationnelle, d’intégration omnicanale et d’exploitation intelligente de la data. Les retailers qui réussiront seront ceux capables de transformer leur modèle pour offrir une expérience client sans couture, tout en maîtrisant leurs coûts et en innovant dans un cadre réglementaire exigeant. L’heure est à l’action : la transformation digitale n’est plus une option, mais une condition de survie et de croissance durable sur le marché européen.