Dans un contexte où le commerce de détail européen est confronté à des bouleversements sans précédent, la question de la rentabilité des investissements dans l’e-commerce et l’omnicanal est plus pressante que jamais. Les trois dernières années ont vu une accélération fulgurante des ventes en ligne, mais aussi une pression accrue sur les marges, exacerbée par l’inflation, la volatilité de la chaîne d’approvisionnement et l’évolution rapide des attentes des consommateurs. Pour les dirigeants européens, il ne s’agit plus seulement de suivre la tendance, mais de repenser en profondeur les modèles opérationnels et technologiques pour garantir la viabilité à long terme.
Selon les dernières études menées auprès de cadres dirigeants du secteur, 85 % des retailers européens estiment que la pandémie a définitivement transformé la relation client et la nature même du commerce. Les consommateurs naviguent désormais sans effort entre les canaux physiques et digitaux : 75 % d’entre eux adoptent une approche véritablement omnicanale, passant du mobile au magasin, du web au retrait en point de vente, selon leurs besoins du moment. Cette fluidité, si elle offre des opportunités de croissance, complexifie aussi la gestion des coûts et la rentabilité des différents canaux.
La réalité économique est sans appel : près de la moitié des distributeurs traditionnels européens déclarent que leur canal e-commerce est moins rentable que leurs magasins physiques. Plus inquiétant encore, 44 % des pure players du digital ne sont pas rentables, même après deux années de croissance exceptionnelle. Cette situation met en lumière un paradoxe : alors que le chiffre d’affaires en ligne progresse, la rentabilité ne suit pas, en raison de coûts logistiques élevés, d’une pression sur les prix et d’une complexité accrue des opérations.
Les dirigeants interrogés identifient plusieurs obstacles majeurs à l’amélioration de la rentabilité :
Face à ces défis, la majorité des décideurs européens affirment savoir ce qu’il faudrait faire pour améliorer la rentabilité, mais moins de la moitié parviennent à mettre en œuvre ces changements à l’échelle, faute d’agilité et de gouvernance adaptée.
L’analyse des meilleures pratiques en Europe fait émerger cinq axes d’investissement prioritaires :
Pour réussir cette transformation, les entreprises européennes doivent repenser leur gouvernance. On observe l’émergence de nouveaux rôles (Chief Customer Experience Officer, Chief Omnichannel Officer) et une montée en puissance des experts supply chain et data au sein des comités de direction. L’enjeu est de casser les silos, d’accélérer la prise de décision et de favoriser une culture de l’expérimentation, où l’échec rapide est accepté au service de l’innovation continue.
La rentabilité du commerce digital en Europe n’est pas une fatalité. Les entreprises qui sauront investir dans l’expérience client, l’intégration omnicanale, la modernisation technologique et l’exploitation intelligente de la data seront les mieux placées pour transformer la contrainte en avantage concurrentiel. Dans un environnement où l’incertitude économique et réglementaire est la norme, l’agilité, la collaboration et l’orientation client doivent devenir les maîtres-mots de la transformation du retail européen.
En somme, l’avenir du commerce de détail en Europe appartient à ceux qui sauront conjuguer innovation, discipline opérationnelle et vision centrée sur le client, tout en s’adaptant aux spécificités réglementaires et culturelles du continent.