L’avenir de la banque commerciale en Europe : De la centration produit à la centration client
Réinventer la banque commerciale pour répondre aux attentes des entreprises européennes
La banque commerciale européenne traverse une période charnière. Face à la montée en puissance des néobanques, à l’évolution rapide des attentes des clients professionnels et à la pression réglementaire croissante, les banques traditionnelles doivent repenser en profondeur leur modèle. L’enjeu n’est plus seulement d’offrir des produits financiers, mais de devenir de véritables partenaires, capables de résoudre les problématiques spécifiques de chaque entreprise, quelle que soit sa taille ou son secteur.
Un secteur sous pression : concurrence, digitalisation et attentes accrues
La concurrence s’intensifie, portée par l’arrivée de nouveaux acteurs digitaux et la spécialisation de banques challengers sur des segments rentables comme les PME. Au Royaume-Uni, par exemple, les banques spécialisées et challengers représentent désormais plus de la moitié des nouveaux crédits accordés aux petites entreprises. Cette dynamique se retrouve dans de nombreux pays européens, où les clients professionnels, de plus en plus digitalisés, attendent des expériences fluides, personnalisées et omnicanales.
Pourtant, la majorité des banques commerciales européennes restent organisées autour de silos produits, avec des systèmes d’information fragmentés et des parcours clients peu intégrés. Résultat : l’expérience client est souvent déconnectée, les délais d’accès aux services sont longs, et le passage d’un segment à l’autre (par exemple, de la petite entreprise à l’ETI) s’apparente à un changement de banque.
Les défis de la transformation digitale : agilité, modernisation et expérience client
Les banques européennes sont conscientes de la nécessité d’accélérer leur transformation digitale. Selon les dirigeants interrogés, l’excellence de l’expérience client et l’agilité opérationnelle figurent parmi les priorités absolues. Pourtant, des obstacles majeurs subsistent :
- Manque d’agilité opérationnelle : la capacité à pivoter rapidement face à l’évolution des besoins clients reste limitée, en particulier dans les grandes banques.
- Technologies héritées : les systèmes legacy freinent l’innovation et la mise en place de parcours clients unifiés.
- Investissements insuffisants dans l’innovation digitale : 58% des dirigeants estiment que leur organisation n’investit pas assez pour rivaliser avec les néobanques.
- Difficulté à exploiter la donnée : l’accès à une donnée client de qualité, centralisée et exploitable en temps réel, est encore loin d’être généralisé.
De la vente de produits à la résolution de problèmes : le nouveau paradigme
La véritable rupture consiste à passer d’une logique de vente de produits à une logique de résolution de problèmes pour les clients professionnels. Cela implique :
- Des interactions centrées sur la situation du client : conseils proactifs, recommandations personnalisées, anticipation des besoins (ex : accompagnement à l’international, gestion de crise sectorielle, optimisation de la trésorerie).
- Des parcours fluides et cohérents : accès rapide à l’ensemble des services, continuité de l’expérience quel que soit le canal ou le segment.
- Une exploitation intelligente de la donnée et de l’IA : pour personnaliser l’expérience, accélérer les processus (onboarding, octroi de crédit) et proposer des services à valeur ajoutée.
- Des architectures « coreless » et modulaires : pour casser les silos, faciliter l’intégration de nouveaux services et partenaires, et accélérer l’innovation.
Les leviers pour réussir la transformation
Pour opérer ce changement de paradigme, les banques commerciales européennes doivent agir sur plusieurs leviers structurants :
- Modernisation des systèmes d’information : migration vers des architectures cloud, découplage des données, APIs ouvertes.
- Adoption de modèles agiles : équipes pluridisciplinaires organisées autour des segments clients, financement flexible des projets, culture de l’expérimentation.
- Investissement dans la donnée et l’IA : centralisation, gouvernance, exploitation avancée pour la personnalisation et l’automatisation.
- Développement de l’omnicanal : intégration fluide des canaux digitaux et humains, avec des outils d’assistance intelligente (chatbots, conseillers augmentés).
- Extension de la proposition de valeur : au-delà des services bancaires traditionnels, offrir des solutions sectorielles, du conseil, des services intégrés (assurance, gestion des risques, mise en relation business).
Conclusion : une opportunité à saisir pour les banques européennes
La transformation vers une banque commerciale centrée client n’est plus une option, mais une nécessité pour rester compétitif dans le paysage européen. Les banques qui sauront combiner excellence opérationnelle, innovation digitale et proximité relationnelle seront les mieux placées pour fidéliser leurs clients professionnels, capter de nouveaux marchés et générer une croissance durable. L’heure est venue de passer du produit à la solution, du silo à l’écosystème, et de faire de l’expérience client le véritable moteur de la performance bancaire en Europe.